lundi 14 avril 2008

L’euthanasie ? Mais non, ça n’existe pas…

Vincent Humbert, Chantal Sébire… ça vous parle surement…

Ces gens ont demandé à mourir. À ne plus vivre. À ne plus souffrir.

Dis comme ça, ce n’est pas trop problématique. Le suicide n’étant puni que religieusement, la pire sentence que l’on peut prononcer contre les personnes mettant fin à leur vie, c’est d’aller en enfer, ce qui ne peut pas être pire que la mort.

Non, le problème vient juste du fait qu’ils le demandent à des médecins, des personnes qui sont sensé soigner. Comment concilier ce pour quoi ils donnent leur vie avec le souhait, le bien-être des patients ?

Le bien-être ou le bien-mourir ??

Je savais, par quelques personnes de mon entourage, que ces pratiques de fin de vie accélérée existaient, mais j'avais rangé ça dans un coin de ma tête. Je l'avais refoulé, comme dirait le petit bonhomme barbu, assis derrière moi qui suis allongé sur son canapé.

Alors qu'on m'apprend à "promouvoir la vie", là, on l'abrège.

Lors d'un stage en Oncologie (cancéro), j'ai rencontré pour la première fois plus que la souffrance et la douleur des patients, c'était l'impuissance, le désarroi, l’incompréhension des familles. Et parfois, tout ça ensemble, mêlé à la peur, ressortant en colère. Être pris à parti dans un couloir par une dame (je sortais de la chambre de son mari, Mr A.) et s’entendre dire « qu’on ne s’occupe pas de lui, on le laisse dans un état pitoyable, on s’en fout ici, de tout le monde, c’est du sadisme, oui VOUS, vous êtes un sadique», …
Donc, première étape, ne pas rester dans le couloir, mais aller dans une pièce où nous pourrions être tout le deux. Ensuite, la laisser exprimer la colère, vider toute sa rage et son désespoir. Sa tristesse. Et ne pas répondre aux insultes. Ce n'est pas moi qu'elle accuse, ni l'équipe, bien évidemment. C'est la vie.

C'est sa peur.

Son le mari était en train de mourir.

Après avoir discuté avec elle pendant peut-être 1/4 d'heure, elle était apaisée. Je suis allé voir le médecin du service pour lui dire combien la dame était perturbée. Il m'a dit que ça ne l'étonnait pas. Elle n'arrivait pas du tout à accepter l'état de son mari, sa mort proche, certes, mais surtout inconnue. Il m'a dit qu'il pouvait rester encore longtemps comme ça, à souffrir. Rien ne le calmait. C'était, si je me souviens bien, un cancer poumons/estomac/os et il avait une hémiplégie gauche. Une métastase au cerveau? AVC? Je ne m'en souviens plus...

J'ai pu ensuite discuté avec Mme A. Elle m'a dit qu'il avait demandé à l'équipe, lorsqu'il ne se sentirait plus de se voir comme ça, de "faire ce qu'il faudrait".

Pendant un week-end il est tombé dans une sorte de coma. Puis le lundi, il s'est réveillé. J'ai essayé de passer le plus possible le voir. Un peu de temps après, je me suis trouvé à entrer dans la chambre en même temps que le médecin. Nous nous sommes approchés car il essayait de dire quelque chose. Nous avons entendu.
"Je suis prêt"
Mme A. est sorti de la chambre en fondant en larmes.
J'ai essayé de garder mon calme, mais à l'intérieur j'étais renversé.

J'ai assisté à la pause de la seringue (composée d'un produit destiné à endormir.), ai dis au revoir au monsieur, ai embrassé Mme A, et suis sorti. Elle désirait rester seule avec lui. Normal.
Je suis allé aux toilettes pour évacuer dans les larmes toute la tension que j'avais accumulé.

Mme A nous a remercié "du fond du coeur pour toute l'aide et l'amour qui ont été portés" à son mari.

Mon avis n'a pas grand poids dans la grande machine de la Loi, mais face à la réalité des faits, face à notre impuissance à agir sur certaines choses, et surtout lorsque l'aval des patients et des familles est donné...
Le Législateur est hypocrite car il sait très bien ce qui se passe. Je pense qu'il faudrait officialiser certaines actions.
Certes, les médecins sont des personnes qui ont prêté le serment d’Hippocrate, où il est notamment écrit "Je ne remettrai à personne du poison" et dans le serment de l'ordre français des médecins il y a "Je ne provoquerai jamais la mort délibérément"
Ok
mais dans le même texte, il y a "Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies".

Vaste débat...

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